Une séance d’art-thérapie, pourquoi et comment ?
L’art-thérapeute détermine ensuite, en présence des parents, les objectifs thérapeutiques. Il est essentiel de savoir pourquoi l’on vient et vers quoi l’enfant doit cheminer. Ce qui importe dans l’atelier, ce n’est pas de «faire du beau», mais d’amener l’enfant à se laisser aller, à jouer, à créer et surtout à s’amuser ou à renouer avec le plaisir.
Donald Woods Winnicott (1896-1971), pédiatre et psychiatre britannique, disait lui même que «jouer est une activité naturelle chez l’enfant en bonne santé et une activité fondamentale de l’enfant qui la pratique. Si l’enfant joue, cela peut être par plaisir, pour maîtriser l’angoisse, accroître son expérience ou établir ses contacts sociaux». Lorsqu’il «joue à peindre» ou à dessiner , l’enfant concrétise ses émotions, fait ses expériences et entre en contact avec le monde. En peignant, ce sont ses émotions et ses sensations qu’il exprime. Le jeu lui permet de mettre en scène au-dehors ce qui se passe au-dedans. Cela explique en partie la grande valeur du jeu dans l’évolution psychique de l’enfant. C’est à cette condition qu’il est à même d’utiliser sa personnalité tout entière et de découvrir qui il est. Lorsqu’il est dans le jeu, l’enfant n’a pas besoin de dire les choses, elles se font par le jeu lui-même…
Au début de l’atelier, l’enfant va découvrir les outils qui sont mis à sa disposition pour qu’il puisse s’exprimer, par exemple par le dessin. Il choisira sa matière – gouache, crayons, peinture, feutres, etc. – mais aussi son espace créatif – feuille, toile, carton, etc. Il utilisera des outils – brosses, pinceaux, etc. – et, s’il est suffisamment en confiance, il pourra se mettre à créer. Toutes ses oeuvres sont protégées dans un espace dédié auquel seul l’art-thérapeute et l’enfant concerné ont accès: il pourra dès lors s’exprimer librement et en toute sécurité.
L’intérêt de cette approche, c’est le processus qui se déroule au long des séances et non pas le produit fini qui se voudrait d’être beau. L’art-thérapeute, lui, est sensible à ce qui se déroule dans l’atelier, aussi bien sur le faire et l’agir que sur le déroulement du processus créatif. Il sera attentif, tout au long des séances, au placement dans l’espace, au choix des matières, aux découvertes plastiques que l’enfant s’autorise. Par exemple, son besoin d’expérimenter par le jeu une nouvelle matière, de prendre de la gouache à pleines mains et de peindre avec ses doigts… Que fera-t-il lors de la séance suivante ? Continuera- t-il son expérimentation et la déclinera t- il ? Ou, au contraire, passera-t-il à autre chose ? Dans l’atelier, c’est la matière choisie qui fait office de parole. Cela est intéressant lorsqu’on se rend compte que l’enfant n’arrive pas à utiliser la parole pour exprimer ce qui ne va pas. Le langage utilisé par l’art-thérapeute est un parler technique : par exemple, si l’on repère qu’un enfant est bloqué sur sa création, l’art-thérapeute ne dira pas «ta maison est bancale, regarde comment elle doit être», il ne porte pas de jugement de valeur. L’enfant doit être en accord avec sa réalisation qui est l’expression de ce qu’il est au moment «t». Cependant, l’art-thérapeute le guidera – grâce au parler technique – pour qu’il trouve lui-même ce qui le freine dans l’élaboration de son dessin. Ce sera l’occasion pour lui d’exprimer ses sensations, son ressenti, ce qu’il ne parvenait pas à dire et à faire spontanément auparavant et ainsi de poursuivre sa recherche plastique. L’objectif est d’amener l’enfant à prendre du recul et à trouver la solution de passage lorsqu’il est confronté à une difficulté.
Si l’enfant est suivi par un psychologue ou par un psychothérapeute et que ce dernier constate que les séances stagnent dans leur progression, l’art-thérapie peut permettre de débloquer des situations par des chemins de détour, débloquer la parole parfois et il pourra continuer à avancer.